Tuesday, December 3, 2024
Le gouvernement français sera renversé mercredi – « à moins qu'un autre miracle ne se produise »
journal berlinois
Le gouvernement français sera renversé mercredi – « à moins qu'un autre miracle ne se produise »
Raphael Schmeller • 9 heures • 2 minutes de lecture
Après seulement deux mois, le mandat du premier ministre français Michel Barnier sera bientôt terminé.
Les choses se corsent pour le gouvernement français. Faute de majorité, le premier ministre Michel Barnier a fait passer lundi au Parlement son budget controversé pour 2025 sans autre vote - avec l'aide du tristement célèbre article constitutionnel 49.3.
Cette manœuvre pourrait signifier la fin du gouvernement. Car immédiatement après un décret 49.3, l'Assemblée nationale peut imposer un vote de confiance au gouvernement. La gauche et la droite – unies dans leur frustration face au résultat du débat budgétaire et indignées par la manœuvre de l'article 49.3 visant à outrepasser le Parlement dans l'exercice de son droit le plus important – risquent de faire tomber le faible cabinet Barnier cette semaine.
L'alliance de gauche Nouveau Front Populaire (NFP) veut déposer une motion de censure au Parlement mercredi ou jeudi. Le chef du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a annoncé lundi que son parti approuverait la motion « à moins qu'un miracle ne se produise à la dernière minute ». Barnier a appelé lundi après-midi la présidente du caucus du RN, Marine Le Pen, pour l'informer qu'il renoncerait à l'augmentation prévue de la quote-part pour les médicaments sur ordonnance. La semaine dernière, à la demande de Le Pen, Barnier avait déjà renoncé à l'augmentation des taxes sur l'électricité et annoncé des coupes dans les soins de santé pour les migrants sans statut de résident légal. Mais ces concessions n'étaient apparemment pas suffisantes. Le Pen a aussi annoncé en après-midi qu'il appuierait la motion de censure de la gauche. Le NFP et le RN disposent ensemble de plus de 300 voix, soit la majorité absolue à l'Assemblée nationale.
Le gouvernement français ne tient qu'à un fil - un vote de censure probable
Macron a nommé le conservateur Barnier à la tête du gouvernement après les élections législatives anticipées de début septembre, même si l'alliance de gauche NFP a remporté les voix. Depuis, Barnier a plus mal que bien gouverné : son alliance des conservateurs et du camp central de Macron dispose de 211 voix sur les 577 membres de l'Assemblée nationale et est donc paralysée.
Sous le président Emmanuel Macron, les gouvernements ont déjà eu recours à l'article 49.3 à plusieurs reprises. La demande la plus marquante a eu lieu au printemps 2023 pour faire adopter la réforme très controversée des retraites, bien que le Parlement et pas moins de 80 pour cent de la population aient rejeté la mesure.
Le débat budgétaire actuel porte sur la volonté de Barnier d’économiser 60 milliards d’euros dans le budget de 2025. L'objectif est de réduire le déficit de la France à cinq pour cent l'an prochain et à trois pour cent d'ici 2029 ; le maximum permis par les règles de l’UE en matière de dette. Le premier ministre insiste pour agir avec sérieux et responsabilité. Il ne permettra pas aux partis parlementaires de confondre politique budgétaire et politique clientéliste. La situation financière de la république est bien trop grave pour cela.
En fait, les coûts d'emprunt de la France sont maintenant plus élevés que ceux de la Grèce. La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a déclaré, à propos de la crise de l'euro de 2009, que la France était confrontée à un possible « scénario grec ». Le ministre des Finances Antoine Armand a comparé la France à un « avion de passagers à haute altitude risquant de s'écraser ».
Si la France n’a plus de gouvernement à partir de mercredi ou jeudi, la situation va encore s’aggraver. On ne sait pas du tout comment les choses vont se dérouler dans les prochaines semaines. Le pays traverse une crise politique profonde dans laquelle trois blocs de force à peu près égale – centre, gauche et droite – se bloquent.